« D’ici cinquante ans, on verra dans les musées les portraits que j’aurai peints, de tant de littérateurs, mes amis ; et de l’auteur de ces portraits, il n’y aura trace dans aucun livre de son époque. Je suis peut-être le seul artiste de mon âge, dont il n’existe pas la moindre monographie et que le Larousse ignore » : en écrivant cette prophétie en 1921, Jacques-émile Blanche ne pouvait pas imaginer qu’il faudrait attendre 90 ans pour que son œuvre soit enfin rassemblée dans un livre !L’exposition au musée de Rouen en 1997 est la première consacrée à l’artiste après la rétrospective organisée au musée de l’Orangerie en 1943, et les deux catalogues sont épuisés dès les premières semaines : Jacques-émile Blanche a un public enthousiaste. Cette monographie, la première consacrée au peintre, est attendue depuis longtemps, aussi bien par les collectionneurs que les institutions qui possèdent des œuvres de l’artiste.Il était, de son vivant, un peintre de renom, mais aussi un pianiste de niveau professionnel, pouvant déchiffrer les partitions les plus difficiles, un écrivain ayant publié plus de quarante livres, ou encore un commentateur prolifique de la presse parisienne. à cause de cette multiplicité de talents, ses contemporains-critiques, confrères et même ses amis ne furent jamais tendres avec Blanche et lui reprochèrent sans cesse d’être un touche-à-tout, de vivre oisivement de rentes conséquentes, d’être trop doué, et d’être surtout excessivement mondain … « On m’a cruellement fait sentir les privilèges dont j’ai été comblé », confiera-t-il.C’est pourtant, dès 1880, à l’âge de dix-neuf ans, que Blanche avait résolument choisi la peinture comme son véritable « métier » : les mille cinq cents œuvres répertoriéestémoignent d’un travail sans relâche et de la passion dévorante de toute une vie.Abondamment documenté l’ouvrage de Jane Roberts redonne à Jacques-émile Blanche une place prééminente parmi les grands peintres de la « Belle époque » et de l’entre-deux guerres, au même titre qu’un Helleu ou un Boldini.