Editions Gourcuff Gradenigo
Antique
La seconde vie de Pompei
Renouveau de l’Antique,
des Lumières au Romantisme 1738-1860
Maria Teresa Caracciolo
historienne d’art, chargée de recherches au CNRS spécialiste de la peinture européenne du XVIIIe.
La ville antique de Pompéi n’aurait été qu’un centre provincial de l’Empire romain comme tant d’autres, si une éruption du Vésuve, survenue en l’an 79 après J.-C., ne l’avait pas entièrement détruite, et aussitôt préservée, en la recouvrant d’une épaisse couche de cendres et de matières volcaniques solidifiées. Cette protection conserva les vestiges de l’antique Pompéi au cours d’environ mille sept cents ans. En 1748, les équipes d’ingénieurs militaires qui effectuaient pour le roi de Naples des fouilles archéologiques dans la région vésuvienne, faisaient les premières découvertes sur le site. 1748 devint alors celle du début de la nouvelle vie de la cité romaine qui habita pendant plus de deux cents ans, et habite encore l’imaginaire européen.
Curieusement, le temps des premières découvertes à Pompéi coïncida avec celui d’une recrudescence de l’activité volcanique du Vésuve, qui connut dans la seconde moitié du XVIIIe siècle de fréquentes éruptions. Les yeux de l’Europe toute entière se tournèrent alors vers Naples et vers la Campanie.
Au XVIIIe siècle, la fortune naissante de Pompéi ne fut pas orientée vers la ville elle-même, mais se focalisa essentiellement sur quelques antiques extraites de son sous-sol. Ce fut alors que firent leur apparition dans l’art occidental les variations sur le thème des satyres et des vols de centaures, faunes et bacchantes amoureux, comme les interprétations les plus variées du thème des danseuses dites d’Herculanum et de celui de l’Amour prisonnier. Dans la décoration intérieure, le traitement des parois à la pompéienne s’imposa, et dans les arts décoratifs l’adoption d’un mobilier et d’objets imitant ceux qui ornaient les demeures des anciens Pompéiens, tels les tripodes, les candélabres, les lampes, les cassolettes, les vases, les amphores, devint une mode incontournable.
Au début du XIXe siècle, notamment au cours des règnes de deux souverains français, Joseph Bonaparte et Joachim Murat, une programmation globale des fouilles de Pompéi put être formulée et le périmètre des murailles de la ville antique fut tracé avec précision. L’attention se déplaça alors vers l’architecture et l’urbanisme de la cité. L’ouvrage d’un architecte français protégé de la reine Caroline Murat synthétise le tournant vécu par l’archéologie pompéienne : « Les Ruines de Pompéi » de François Mazois, qui fut publié en plusieurs volumes entre 1813 et 1838. Le recueil permettait en effet de circuler dans les rues de Pompéi, de pénétrer dans les habitations et dans les thermes, de visiter ses temples et de participer aux jeux et aux compétitions dans ses théâtres. Le quotidien des Anciens redevenait familier aux Modernes du XIXe siècle et en pleine éclosion du Romantisme, enflamma leur imagination. La ville antique devint alors le cadre d’une vaste production littéraire, théâtrale, musicale, peinte, sculptée, dessinée et gravée, faisant revivre les histoires du passé et privilégiant généralement « les derniers jours de Pompéi » au cours desquels l’éruption meurtrière avait forgé le mythe de la cité.
La seconde vie de Pompéi véhiculée par les tableaux-phares d’une époque, par des pochades et des tableautins ; s’exprima par la plume d’écrivains d’élite, comme par celle de romanciers populaires, dont les œuvres furent couronnées d’un succès éphémère. Elle toucha ainsi un public extrêmement large, ce même public qui nourrit aujourd’hui, inlassablement, les flux de visiteurs qui se rendent sur le site, pèlerins des temps modernes partis de tous les pays du monde pour le voir de leurs propres yeux
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